L'indifférence des français et des belges (francophones) pour leurs voisins européens : une pièce de plus au dossier de l'absence de communauté politique européenne ?

Par Sophie Duchesne, Virginie Van Ingelgom
Français

Partant du constat d’une asymétrie entre la mise en place d’une citoyenneté européenne et la persistance du cadre d’identification nationale des Européens, ce texte aborde la question des sentiments réciproques que se portent les Européens dans le cadre d’une interrogation sur les mécanismes de création d’une communauté politique européenne : est-ce qu’une « préférence pour les autres Européens » pourrait, dans le moyen terme, compenser l’absence de connaissance, d’intérêt et d’attachement des Européens pour leur Union ? L’analyse porte sur 8 focus groups réalisés en Belgique (francophone) et en France, selon une méthodologie particulière qui vise à faciliter l’expression des objets de conflit entre participants ; ces discussions sont par là même particulièrement marquées par les émotions. Les émotions manifestées par les participants à ces groupes à l’égard des autres Européens sont analysées grâce à la combinaison de trois méthodes aussi différentes que complémentaires (analyse interprétative de la dynamique des groupes, analyse automatique de texte et codification). L’analyse montre que si les Européens – et plus particulièrement les Européens de l’Ouest - sont bien présents dans ces discussions, l’intensité émotionnelle des échanges qui portent sur eux est faible et ne permet pas de nourrir la thèse de la préférence européenne. Par contre, elle suggère qu’ils ne possèdent pas (plus ?) à l’égard des Belges (francophones) et des Français la qualité « d’autres », au sens de ceux qui fondent l’identité de soi par la différence. Un résultat qui prendra un sens différent pour les tenants du post-nationalisme et ceux qui voient dans l’intégration européenne un processus similaire aux constructions nationales des siècles passés.

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